lundi 28 juin 2010

Culture de masse


Je m'adresse ici à ceux et celles qui ont peu ou prou mon âge et que l'on avait en leur temps baptisés de "Génération Mitterrand", parce qu'à l'époque (je parle de la grande, celle des débuts, la seule, la période 1981-1982 où en pensait encore qu'il allait foutre le bordel et donner du pied dans la fourmilière et non juste virer la reine pour prendre sa place), donc à l'époque, cela avait fait un tel bruit, un tel barouf, symbolique plus que politique, tout à cause d'un mec qui ne dépassait pas la taille de Sarko mais qui traversait le boulevard Saint-Michel sans regarder, une rose à la main, pour se rendre au Panthéon.

Souvenez-vous des Paris de Mitterrand, l'abolition de la peine de mort, les magnétoscopes bloqués à Poitiers tels les Arabes par Charles Martel 12 siècles plus tôt, la démocratisation de la culture par Jack Lang, la première fête de la musique, on avait 14, 15 ans, et on pensait que ça allait changer.
Qu'est-ce qui a vraiment changé, en fin de compte ?
Il reste la fête de la musique. La guillottine au Musée Grévin.
Et un peu, un tout petit peu, de démocratisation de la culture.

Ne changeons pas nos habitudes, et faisons une fois de plus preuve de mauvaise foi géographique pour argumenter notre propos. La géolocalisation de nos photos a ceci de merveilleux que maintenant, lorsque vous demandez un jour pour enfant malade, votre patron peut vérifier sur Flickr ou Panoramio si en fait vous ne vous êtes pas fait un week-end prolongé à Center Park ou au Cap d'Agde.

Un américain, Eric Fischer, publie ainsi une cartographie des photos mises en ligne sur Panoramio, en distinguant en rouge, les lieux les plus photographiés par les touristes, en jaune, ceux qui le sont moins, et en bleu, ceux qui le sont par les habitants de la ville, les résidents.

Prenez Venise, par exemple : les touristes ont tellement attendu, parfois toute une vie, pour visiter la Cité des Doges, qu'ils mitraillent la ville depuis le pont qui la relie à Mestre, tellement ils sont contents d'y être enfin. Puis ils embrayent sur un vaporetto sur le Grand Canal, le 17 pour Murano, go and back, et l'affaire est pliée.
Mais le plus marquant reste cependant l'absence des Vénitiens. La carte ne fait en effet apparaître aucune prise de vue en bleu, réalisée par un autochtone, à croire qu'il n'y en a pas, qu'ils n'ont pas internet, pas d'appareil numérique, ou tout simplement aucune sensibilité esthétique.





Prenez Paris, la Ville-Lumière, la ville la plus touristique au monde. On voit ressortir l'Axe Majeur voulu par Mitterrand, depuis le Châtelet à La Défense, Montmartre, les Buttes-Chaumont, le Quartier Latin, le Trocadéro.
Constatez au sud-ouest que le service communication de la mairie de Versailles semble bien peu performant, puisque les Versaillais eux-même ignorent l'existence d'un château dans le ville, mitraillé par ailleurs par les touristes.

Force cependant est de constater que la politique de démocratisation de la culture cher à Mitterrand existe bien à Paris, autant qu'il est absent à Venise, puisque même les populations défavorisées et pas franchement de chez nous prennent quand même des photos de l'Est parisien que désertent les touristes. Et en premier lieu, le site de... la bibliothèque François Mitterrand.


5 commentaires:

Tatiana a dit…

Hey oh quand même il en reste des trucs de ses mandats, faut pas exagérer.... On a cru que ça allait changer et ça a changé, dommage que l'on régresse à présent !!!

Fantomêtte a dit…

et le nombre de fois où l'on prend son amoureux en photo ça compte dans les stats?

Fabien a dit…

De régressions en régressions, de reculs en réformes qui démantèlent, je crois qu'il n'y a rien de plus beau qu'une photo d'amoureux.
Vraiment.

Delph a dit…

La géo comme ça, c'est vraiment un régal !

Fabien a dit…

Merci, Delph.

La géo déjantée, je sais faire.
C'est chouette de voir tu passes parfois par ici.