lundi 30 décembre 2013

Rétrospective /27 (Choisir son Paradis)



L’avenir nous dira s’il fallait y voir une attention prémonitoire, mais le père Noël, qui sait se montrer plein de générosité parfois avec ses sujets les plus fidèles et punir ceux qui dès la communion passée et les cadeaux ouverts cessent de croire en Lui, le père Noël m’apporta donc il y a quelques années un livre, riche, dense, docte, et agrémenté d’illustrations dont Le Jardin des Délices de Jérôme Bosch, sur l’histoire du Paradis.

Cadeau fort à propos puisque qu'à l'âge vénérable qui est désormais le mien, je m'interroge de plus en plus sur mon éventuelle trajectoire post-mortem et que j'adore ce genre de tableau sur lequel un peintre du Moyen-Age a pu peindre autant de cochonneries sous couvert de religion.

Or donc, force m’est de constater que conscient de voir défiler les jours qui me rapprochent toujours d’un ultime couic qui pourrait n’être qu’un discret soupir comme le fut sa vie (je cite ici la facture d'un marbrier à qui Fantômette a déjà fait réaliser le travail afin de pouvoir se rendre illico presto chez le notaire, sans prendre le temps d’une larme sur une terre fraichement retournée pour camoufler le résidu de mon trépas, pourvu que la succession soit en règle et que l'encre fut sèche dans ledit office notarial), je ne crois toujours pas en Dieu ni en ses dérivés divers et variés, gourous, homéopathes, scientologues, millénaristes, politiciens de l'UMP et autres astrologues qui me prêteraient une attention digne des richesses terrestres accumulées au cours de ma vie pourvu que je leur en fasse don avant d'expirer.

Alors quoi ?
L'heure est peut-être venue de choisir mon Paradis, d'autant que ce choix engage pour l'éternité, sans période d'essai.

Si l’on s’en réfère aux trois monothéismes méditerranéens seulement, le Paradis a souvent un goût de déjà vu et de retour à des sources perdues, si bien perdues qu’elles ne sont pas vraiment miennes.

Pour les juifs, le Paradis s’incarne en une terre de lait et miel, tellement promise par un Dieu omnipotent qu’aujourd’hui encore certains se battent pour récolter quelques gouttes et, de temps à autre, une balle perdue, surtout si on est Palestinien. En même temps, je n’ai pas franchement envie de finir à perpétuité dans un kibboutz ou une colonie de peuplement. Et quand on voit que Yahvé aurait mis quarante ans à repérer enfin Moïse dans le désert du Sinaï après que Pharaon ne l’eut expulsé comme un vulgaire Rom, on peut douter du service après-vente.  Qui plus est pour lui envoyer un buisson ardent quand l'autre attendait certainement davantage une bière bien fraîche après tant d'années d'errance à écouter les jérémiades du Peuple Elu répétant :
- C'est quand qu'on arrive ?

J'ai fait le test hier, mon GPS n’est pas casher et répond adresse inconnue quand je tape « paradis Terre Promise lait miel ». Notez que la même requête sur Google me renvoie sur SexBook.

Accéder au Paradis chez les chrétiens relève d’une gageure équivalente à celle de trouver une paix durable entre les peuples de Terre Sainte autrement qu’à coups de bulldozer, de murs de béton et de gaz lacrymogènes. Parce que comprenez que chacun naîtrait ici porteur d’un péché originel dont il n’aurait la possibilité de se laver, un truc pas glop hérité de ses ancêtres Adam et Eve, genre maladie orpheline héréditaire et dégénérative qui laisse peu d’espoirs, à tel point même qu’aucun Téléthon n’a encore fait appel à notre obole contre ce fléau, tellement le péché  originel colle à la peau, pire encore que l'acné sur le visage d'un pré-ado.


Amer est le constat, mais depuis la trithérapie, les chances de rémission sont plus élevées avec le sida qu’avec le baptême, ce qui explique le peu d'empressement des papes à prendre position face à l'usage du préservatif quand eux savent l'humanité chrétienne définitivement condamnée par l'eau bénite des fonts baptismaux.
Le seul qui semblerait s’en être sorti serait un certain Jésus Christ, et encore, il aurait été baptisé dans le Jourdain et c’était il y a tellement longtemps que plus personne n’est en mesure de raconter vraiment ce qui s’est passé, à tel point que certains envisagent désormais la Crucifixion comme une fin de partie sado-maso qui aurait mal tourné.

Reste donc le Paradis les Mahométans. Certes, force est de reconnaître que s’interroger sur une conversion, même tardive, aux écrits coraniques, n’est pas chose socialement aisée, surtout par les temps qui courent. Mais force encore est de reconnaître qu’il s’agit là du Paradis qui semble le plus ouvert, surtout pour ceux qui souhaiteraient y entrer sous forme de hachis de chairs et de poudre labellisé hallal. Force également est de reconnaître qu’à la différence des précédents Paradis, entre finir colon pour l’éternité dans une résidence sécurisée en Israël, vulgaire ramasseur de pommes dans les Jardins d’Eden, ou partager avec Dieu vins vieux, jeunes hommes et houris toujours vierges dans les nimbes du Croissant, le choix est vite fait. Non pas que je sois transporté à l’idée de m’acoquiner avec de jeunes garçons, mais si c’est le prix à payer pour approcher une éternité peuplée de houris à la fesse aussi légère que les mœurs dans une ambiance empreinte d'une sensualité débridée et d'un raffinement oriental, alors oui, j’accepte de mettre ce projet à l’étude avant que Fantômette ne prenne rendez-vous avec le notaire pour finaliser le partage des produits de mon passage terrestre.

Interrogée sur le sujet alors qu'elle était plongée dans réalisation du niveau 8 de son 834e jeu d'élevage de pingouins virtuels, Fantômette, avec laquelle j'entendais partager mes interrogations mystiques sur le choix d'une religion à embrasser faute d'autre chose à embrasser, voire plus si affinités, me répondit tout simplement :

- Arrête de faire bouger la souris, moi j'm'en fous, du moment qu'il y a le wifi !

D'après un truc déjà écrit ici, voir ici.

1 commentaire:

Elsaxelle a dit…

Eclat de rire :-)) Merci à vous deux, ça fait du bien de rester un peu sur Terre pour profiter de votre blog.