mardi 18 mars 2008

Fibre sensible


La journée sera dure de migraine. Ben oui, certains mecs ont ça, aussi. C'est une manière d'encaisser.

La vie ne tient parfois qu'à un fil. Vie-tapisserie, même si nous ne sommes pas tous des Guillaume le Conquérant, lissier acharné et fébrile qui tisse, et continue à tisser. Tapisserie pleine de trous, volutes qui deviennent anguleuses, courbes saillies, motifs répétés et interrompus, mille-fleurs inachevés, les fils qui se rompent et ceux dont la qualité décline quand la bobine se dévide, ceux que l'on coupe parce que trop sac de nœuds, ceux qui s'effilochent, fils sur lesquels on tire au risque de les rompre, parfois la trame s'éclaircit, les couleurs pâlissent, les motifs deviennent flous, les fils s'écartent pour laisser passer trop de lumière, il arrive qu'il ne reste qu'un fil. Faut-il le couper ou y nouer-serrer de nouveaux, reprendre le travail qu'on serait tenté de poser, d'abandonner, même s'il ne reste qu'une corde de chanvre ?
Ne pas se laisser décourager, ne pas se laisser abattre, c'est sa vie que le petit artisan bricole sans savoir-faire, mais avec ses doigts, sa tête et son cœur.
La sensibilité, c'est s'émouvoir des couleurs de cette vie-tapisserie, et donner des couleurs aux vies-tapisseries dont on partage, un peu, beaucoup, les trames.
La sensiblerie, c'est prêter ses larmes à l'œil du poisson mort.
Ce très vieux poisson-là, vous pouvez l'admirer au Musée des Tissus de Lyon, en moins flou, mais c'est encore une photo volée.

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