mercredi 24 juin 2009

Désir d'impossibilité


Est-il absurde de désirer l'impossible ?

Certainement pas, parce qu'il n'y aurait alors jamais ni utopie, ni science-fiction, ni avenir, sombre ou radieux. Parce que nous avons besoin de croire. L'Homme aurait-il jamais posé le pied en Amérique ou sur la Lune s'il n'avait jamais désiré l'impossible ? Serait-il jamais retourné en Amérique s'il n'y avait eu d'autres impossibles derrière cet impossible par ailleurs inimaginable ?

Parce que même quand nous renonçons à croire à certains impossibles, que nous baignons notre désir dans le bromure pour éviter qu'il ne se manifeste, le désir demeure. Caché. Mais il demeure.

Il m'est arrivé, ces dernières années, de pleurer sur l'avenir que je pouvais offrir à mes enfants, au bonheur que je pourrais bâtir avec eux après certains évènements de la vie et de leur vie. Parce que, en tant que pôpa poule, version outrageusement capillaire de la mère juive, je les voulais heureux. Parce que, confronté au quotidien, j'avais renoncé à désirer pour eux certains impossibles, parce que je préférais les tenir pour impossibles. Pour avoir moins mal. Pour moins pleurer.

Et voilà-t-y pas que Petit Prince et Petite Princesse sont heureux, et qu'ils le disent, l'affirment, l'affichent, le vivent, le montrent et le sourient. Même Petit Prince, bien que durement touché par les règles de la génétique et gravement handicapé d'un autisme sentimental transmis par son père, se laisse aller et rayonne. Et même que des fois, il se laisse aller à des manifestations de tendresse, de câlins, vers Fantômette ou vers moi. C'est pas difficile, du haut de ses treize ans, des son acnée et de sa coupe à la surfeur californien, des fois, c'est un "je t'aime, papa", qui lui échappe. Comme ça, sans se reprendre après.

La plus belle est certainement Petite Princesse, qui de chat écorché craignant les autres, l'attachement aux autres et de perdre son père, se lâche, s'identifie, rayonne, entre ses quart-de-frères qu'elle a adoptés comme ses frères, adoption mutuelle, Fantômette, à qui elle s'identifie, se pomponne en déguisement de Fantômette, rève de shopping entre filles et lui réclame règulièrement qu'elle soit sa mère, qu'elle l'adopte. Petite Princesse qui découvre ce qu'est une femme, en apprentie gonzesse, qui apprend et s'identifie.

Ma responsabilité d'adulte, notre responsabilité d'adultes, n'est donc plus de désirer l'impossible, mais de vivre, entretenir, faire vivre, préserver et poursuivre un impossible bonheur que j'avais cessé de désirer pour eux. Il a fallu débrouiller les mots, expliquer certaines disparitions brutales, rappeler que les coups de gueule ne sont pas nécessairement divorces et disparitions définitives. Continuer à être heureux, ensemble, clairement et en confiance, sans hypocrisies ni trahisons, ensemble, avec eux, à tous, pour eux.

Et peindre sur chaque mur et chaque nuage qu'il est absurde de ne pas désirer l'impossible. Des fois, ça peut arriver.

4 commentaires:

Fantômette a dit…

Bravo!
Vous êtes recu avec la mention trés bien.
Je veux pouvoir continuer à désirer l'impossible.

Fabien a dit…

So, on continue ?

Fantômette a dit…

Ben oui Monsieur et plutôt deux fois qu'une! (et si on regardait K2000?)

Fabien a dit…

Ach, j'étais jeune en même temps que Chantal Lauby et du début de les Nuls.
Avant de devenir monument historique.