lundi 19 juillet 2010

L'anonymat des petites gens



Il faut certes constater que notre société, et les mentalités qui la régissent et la structurent, évoluent souvent grâce à la pugnacité de certaines personnes qui s'éteignent ensuite dans l'indifférence générale.

Ainsi, Antoine Pinay, l'artisan du nouveau franc qui me permit durant toute mon enfance d'entuber mes grands-parents qui ne maîtrisaient pas les conversions, me permettant ainsi d'acheter une barrette de shit pour le prix d'un carambar, est mort dans l'indifférence de ses contemporains, sans même une aide ménagère pour sortir le chat qui se soulageait sur ses genoux arthritiques avant que les pompiers ne retrouvent son corps à moitié dévoré par les chats après avoir défoncé la porte pour non paiement de la redevance audio-visuelle.
Or, qui ici se souvient d'Antoine Pinay ?
Qu'on me cite une seule école baptisée de son nom !

Emmanuelle Arsan, l'auteur d'Emmanuelle, a plus fait pour l'industrie du fauteuil en rotin que De Gaulle pour les montres Lip.
Or, qui ici peut m'indiquer une ville dans laquelle on trouve une avenue ou un place Emmanuelle Arsan ?
Tiens, d'ailleurs, qui peut ici me dire si Emmanuelle vit toujours ?

Tout le monde se souviendra de Jacques, mais qui se souviendra de Bernadette Chirac qui par trains entiers collectait des convois de pièces jaunes désormais inutiles avant de les charger dans le porte-avion Clémenceau pour que le laiton soit fondu et reconverti en Inde ?
Qui ?

Je voudrais donc ici rendre solennellement hommage à un homme de l'ombre, un grand homme à la personnalité si fade et si peu convaincante que je suis certain que l'histoire l'oubliera aussi vite que fut courte sa carrière chez Jacques Vabre. C'est en effet Jean-Pierre Raffarin qui, après la canicule de l'été 2003 imposa la journée de Solidarité, ce flou juridique qu'est devenu le lundi de Pentecôte où tout le monde travaille mais personne ne bosse. Il s'agit là d'une mesure symbolique, c'est entendu, mais quelle force, quel symbole, pour cet homme si discret !

Jean-Pierre Raffarin a ainsi initié un changement radical de nos mentalités, suscitant un rapprochement intergénérationnel autour de nos aînés, le retour aux valeurs familiales, à la filiation, à l'attention portée aux anciens et à la sollicitude des plus jeunes pour leurs aïeux. Car sans cette prise de conscience voulue par Raffarin, croyez-vous vraiment que Liliane Bettencourt ferait l'objet de toutes les attentions dont la couvrent tant de proches aujourd'hui ?
Elle a du en bosser, des Lundi de Pentecôte, pour être si entourée.

Tant pis si je peine à m'entourer de photographes bling-bling, d'avocats d'affaires et de comptables véreux, tant pis si mon majordome s'est fait la malle, je sais maintenant, à l'heure où Fantômette s'inquiète d'un éventuel report de la date de mon rendez-vous avec la Grande Faucheuse, que grâce à Jean-Pierre, comme Liliane, je ne mourrai pas seul mais entouré de l'affection des miens, même s'ils ne se déclarent que devant notaire à la veille de mon trépas.

2 commentaires:

'Tsuki a dit…

Personne ne se souviendra de personne... C'est juste une question de temps : De gaulle dans cent sera tellement mystifié que ce sera une personne complètement différente à qui on vouera un culte de la personnalité... Et les fauteuils en rotins auront tous été remplacés par des structures en nano-carbone, voyons...

:/

Fabien a dit…

Whaouh, le nano-carbone comme symbolique de l'érotisme bon teint en lieux et places du fauteuil d'Emmanuelle, là, je suis has been !